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M A G A Z I N E S  

 

  

   N°38
Le magazine du patrimoine de l'histoire et de l'art de vivre


I D E E  d é c o
 


Septembre Octobre
 2001


Installé à Corcelle, dans le Doubs, Bernard Lacombe
a mis au point une technique de marqueterie dont il est,
à ce jour, seul maître. Paysages comtois, chevaux, personnages proches ou imaginaires, etc.,
naissent dans les belles essences qu'il affectionne, avec une douceur et une poésie inédites.



 

L'esprit
des lames de bois

le travail du bois. Il s'y consacre depuis... «presque toujours» dit-il.
La fascination pour le noble matériau l'habite sans doute autant aujourd'hui qu'hier quand, tout minot, il passait des heures à observer un voisin de ses parents, ébéniste de métier et marqueteur par passion. Et ce n'est pas un hasard si un de ses premiers cadeaux de Noël fut un établi. Depuis et avec la même passion,
Bernard Lacombe a fourbi ses propres armes, gouges et autres ciseaux à la main, cherchant opiniâtrement à percer le secret des essences indigènes ou exotiques, à les décortiquer, au  besoin au scalpel, avec précision et douceur afin qu'elles parlent. Qu'elles « lui » parlent pour « nous » parler...
Le plus étonnant est que, sans avoir jamais suivi les préceptes de l'école Boulle - bien qu'il en admire la qualité -, Bernard

Homme des bois.

Bernard Lacombe va profiter de sa retraite pour développer et peaufiner son sens de l'essence. et laisser libre cours à cette fibre artistique qui le chatouille depuis l'enfance.

 

Bernard Lacombe est un homme heureux. Dans le petit village de Corcelle, sur les bords du Doubs près de Besançon, entre les sources d'Arcier et le beau château de Vaire-le-Grand, en passant par les roseraies Sauvageot... l'homme prend aujourd'hui sa retraite et va pouvoir consacrer encore plus de temps à activité qu'il préfère :

 

Lacombe a fini par trouver, dans la marqueterie, ce qu'il cherchait : un langage, son propre langage.
Après avoir esquissé son sujet, il procède au choix de la matière. Il colle et superpose les lamelles de bois sur un support neutre de contre-plaqué, en une sorte de millefeuille. Avec une science qu'il peaufine chaque jour un peu plus, tenant compte de la dureté, de la lumière, de la couleur. du potentiel des différentes essences qu'il utilise :les unes après les autres, dans un ordre impérieux.
 

Volumes et volutes

L'espèce de pièce montée, d'apparence étrange, informe, obtenue après serrage à chaud devra en effet dévoiler, au ponçage final, toute l'inspiration qu'il y a mise. En fait, Bernard Lacombe raisonne, pourrait-on dire, à contre-pied, pour pouvoir, une fois son matériau prêt,

en explorer la substance. Ainsi, pour une figure, lui faut-il envisager préalablement les yeux, le nez, les traits marquants, les creux et les ombres aussi, qui se dessineront presque en volume au moment décisif. L'effet est saisissant.
« Je crois que cette nouvelle façon de faire de la marqueterie, je l'ai cherchée longtemps parce due je voulais retrouver l'émerveillement, l'étonnement due j'avais eu enfant, raconte-t-il. A l'époque, c'était m ystérieux pour moi de voir l'artisan cru travail. Je le vouais découper. assembler avec une telle minutie, dans cm ordre dont je ne comprenais pas le sens, des pièces les unes après les autres; et puis, tout à coup, tout devenait lumineux, tout prenait forme. »
La méthode Lacombe - comme on pourrait la nommer, au risque de heurter la modestie du maître - n'est pas seulement spectaculaire. La superposition des pièces de bois donne naissance à des effets

et à des nuances subtils : de flous, de profondeur, de perspectives. L'énergie le disputant à la douceur dans des fondus et des transparences délicates où la qualité des bois s'exprime pleinement.
« C'est la matière qui parle », confirme Bernard Lacombe. Et quelle matière ! Dans l'ancienne cuisine de la vénérable maison familiale qui lui sert d'atelier, l'artiste veille jalousement sur un trésor dont lui seul peut révéler la valeur et qui

Les couches de bois

sont empilées, puis patiemment rabotées au ciseau à bois pour réduire leur épaisseur.
De l'accumulation des fragments o des essence, naissent de subtiles compositions, comme cette vue de Vaire-Arcier.

 

 

est constitué de feuilles de bois exquis : acajou, citronnier, alisier, bouleau, châtaignier, chêne, érable, érable moucheté, frêne, hêtre, merisier, palissandre, noyer, poirier, bois de rose, platane...
Un inventaire sophistiqué qui lui permet d'exprimer toutes les nuances, toutes les couleurs, les textures d'un visage, d'une façade, de la robe d'un animal... Des ciels et des paysages délicats. Les loupes et ronces apportant encore leur complexité, leur raffinement à cette fabuleuse palette. Tout comme les bois teintés dans la masse en provenance du Québec apportent leurs couleurs, leurs lumières singulières (la teinture est injectée dans l'arbre sur pied et se diffuse, se ventile par la sève, colorant sa veine palpitante).
Ce trésor est pour Bernard Lacombe si précieux qu'il en exploite toute la substance, conservant, lorsqu'il cisèle ses formes et ses modèles, le moindre copeau... Des copeaux qui entreront à leur
 

tour, en touches de lumière impressionnistes, dans ses futures « toiles » de bois. Cette valorisation des copeaux est d'ailleurs devenue un peu la marque, la griffe de l'artiste de Corcelle, qui est le seul au monde à les utiliser.

Parole de la matière

Son art si original particulièrement apparent dans ses créations Le Labour, L'hôtel Guyot de Levier, Cheval blanc, Le Violoniste, Corcelle sous la neige, Citadelle, Champ fleuri, Peau-Rouge (au panache majestueux), etc. - lui a ouvert de prestigieuses portes dans des salons et expositions au-delà des frontières régionales, à Tramelon (Suisse) notamment.
Mais, très attaché à sa Franche-Comté, Bernard Lacombe sait privilégier ses relations avec ses proches amateurs, auxquels il n'hésite d'ailleurs jamais à montrer son travail, en direct. On pourra donc apprécier son talent les

ler et 2 décembre 2001 lors de Art'Thise, le 9 décembre à Etalans, le 19 mai 2002 à Sancey-le-Grand, avant qu'il n'expose à nouveau du côté helvète pour Art Basel en juin, l'année prochaine.


Contact: Site Internet très riche  www.marqueterie.fr

1. Bernard Lacombe a exercé jusqu'à très récemment le métier de gardien de la paix à Besançon.
Il est par ailleurs professeur d'aïkido, tout comme son épouse Lucette, passionnée, elle, de peinture.
 

Chaque brin d'herbe

de ce paysage de Vaire-Arcier (dans le Doubs) semble avoir été reconstitué à partir de myriades de lamelles de bois. Tout l'art. de Bernard Lacombe est là.

Texte : Samira Nezzar
Photos : Jack Varlet

 

 

 

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